C’était une première pour le Cercle Les 5 sens by BC ! Mardi 17 mars, la soirée a débuté par un débat sur le thème « Vins de Femmes et Femmes du Vin ». A mes côtés, cinq femmes participaient à cette table-ronde. Compte-rendu des échanges…
Pas facile d’être une femme il y a 30 ans dans le monde des vins et spiritueux, majoritairement masculin. Françoise Rigord nous a conté la méfiance des hommes à son égard lorsqu’elle a décidé de développer la Commanderie de Peyrassol dont son mari, médecin ophtalmologiste, avait hérité. C’est elle qui pendant près de 30 ans a présidé aux destinées de ce vaste domaine avec une passion qu’elle relate dans son ouvrage « La Dame de Peyrassol, une vigneronne en Provence ».
Comment être admise en tant que femme ? Pour Françoise, « grâce au syndicalisme ! » Il faut participer aux réunions de vignerons locaux et faire entendre sa voix. Un avis partagé par Marie-Laure Saint-Martin Humeau, du Domaine de Montlambert à Louzac, productrice de Cognac et de Pineau. Lors des assemblées générales (elle est Présidente des Borderies au sein du syndicat viticole, trésorière du Conservatoire du vignoble charentais, membre de l’assemblée plénière au BNIC !) elle est la seule femme parmi une trentaine d’hommes. Pour autant, elle ne manque aucun rendez-vous. « Il m’est arrivée d’allaiter pendant les réunions, sous les yeux médusés de mes collègues. Depuis, ils me respectent », nous a-t-elle confié en riant.
Ne pas faire de compromis entre sa vie personnelle et professionnelle, telle est l’idée. J’ai raconté au passage comment j’avais vu Marie Laure ajuster le chauffage de la distillation, via son ordinateur, tout en surveillant les devoirs de son fils ! Vive les NTIC…
Les compétences des femmes sont-elles reconnues aujourd’hui ? Pascaline Brisset, co gérante de la société Cognac Brisset, reste perplexe. « Je suis chef d’entreprise quand mon mari n’est pas là ! ». Même si elle développe en partie la production des vodkas Dragon Bleu, les choses ne sont pas si simples... Certains clichés persistent, comme nous l’a confié également Aymone Vigière d'Anval, propriétaire de la cave à vin Le Carton de Six. « Parfois, des clients entrent dans la boutique et cherchent LE caviste. Quand je leur dis que c’est moi le patron, certains sont étonnés ! » Un comble pour Aymone, par ailleurs journaliste « vins » aux magazines Saveurs, Etoile et JDD, qui en connaît, de facto, un rayon sur le sujet !
Pour autant, les mentalités évoluent, comme l’a souligné Ségolène Lefèvre, historienne et auteur du livre « Les femmes et le vin » (à paraître en juin). Les « femmes du vin » sont de plus en plus visibles, notamment grâce aux médias qui les mettent en valeur désormais, allant jusqu’à donner des titres chocs à leurs articles, tels « la femme est l’avenir du vin ». Au-delà de la provocation, il y a une réalité : 63% des acheteurs de vins dans le monde sont des femmes. Plus expertes qu’on ne le croit, elles ont une approche du vin plus simple, naturelle et sensuelle. Il n’est plus rare aujourd’hui de les rencontrer lors des dégustations et sur les salons, bousculant les idées reçues. « Les femmes dégustent de la vodka à 10 h du matin ! » a plaisanté Pascaline, confirmant également leur goût pour les spiritueux, qui ne sont plus réservés aux vieux messieurs…
Mais alors, existe-il des « vins de femmes » ? Côté production, les avis furent unanimes : pour nos intervenantes, un vin est avant tout l’expression d’un terroir, le fruit d’un travail d’équipe où tous les goûts, les inspirations, les talents s’associent pour lui conférer son caractère et sa typicité. Pas de guerre des sexes, donc, mais une jolie conclusion d’Aymone : « Quand les hommes et les femmes savent déguster, échanger librement leurs sensations, ils aiment les mêmes vins ! »
Merci à ces femmes remarquables d’avoir participé à ce passionnant débat et aux vigneronnes qui nous ont fait découvrir leurs cuvées durant le dîner :
- Chantal Brégeon-Gonet, Champagne Philippe Gonet Cuvée Roy Soleil;
- Françoise Rigord, Rosé de Peyrassol;
- Emilie Gervoson, Bordeaux Château Larrivet Haut Brion 2002;
- Pascaline Brisset, Vodmuska.
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